Article paru dans l'Est Républicain en page Vosges (28/01/2004)

Avec la logistique du syndicat du Livre, les papetiers vont tirer un « quatre pages » à des milliers d’exemplaires. Photos Vincent HOPÉ

Les Matussière et Forest jeudi à Fantastic'arts

Malgré la menace de fermeture, le prochain comité central d'entreprise qui se rapproche - le 10 février, avec le plan social à l'ordre du jour -, il règne toujours une ambiance résolument tonique à l'entrée de la papeterie Matussière et Forest de Rambervillers. Le travail continue, les camions entrent et sortent normalement. A ceci près qu'ils se faufilent entre le feu de palettes et les chalets de Noël de la ville de Rambervillers.

Les salariés s'y relaient pour monter la garde. Au comptoir, on peut boire un café chaud en parcourant la revue de presse affichée sur les parois de bois, avec la liste des courses à faire chaque matin pour ravitailler les équipes de garde (dix baguettes, dix petits pâtés, deux brioches) et la « note de service » rappelant que la ville de Rambervillers offre aux mêmes « dix repas chaque midi à la maison de retraite des Lilas ».

Solidarité active
Hier après-midi, ils étaient un peu moins nombreux que d'habitude à l'entrée, entre neige et bouillasse. Car il y avait veillée d'armes dans la salle du comité d'entreprise, où l'intersyndicale CGT-CFDT accueillait les collègues venus des sites MF de Raon-l'Etape et Turckheim, des papeteries vosgiennes Norske Skog Golbey, International Paper-Anould, Novacare de Laval-sur-Vologne et Otor Velin d'Eloyes, et les responsables de branche des deux organisations : pour la Filpac-CGT Michel Muller, son secrétaire général, et le délégué fédéral Guy Peyronneau de Matussière et Forest ; pour la CFDT Dominique Bousquenaud, secrétaire du syndicat Chimie-Energie Lorraine et Philippe Cunin, en charge du secteur Vosges.

Objectif de cette assemblée qui réunissait une cinquantaine de participants : témoigner une « solidarité active » avec les salariés de Rambervillers en les aidant dans leur combat pour la survie. Pendant plus de deux heures, autour du secrétaire du comité d'entreprise Yannick Marquis et des délégués, tout le monde s'y est mis pour mettre au point un plan d'action destiné à populariser cette lutte, notamment en expliquant que le coup dur qui frappe la papeterie, ça n'arrive pas qu'aux autres...

Manifestation à Epinal le 14 février
« Il faut dire que ces logiques capitalistiques sont idiotes. Il faut le gueuler haut et fort ! Même économiquement, la fermeture de cette entreprise ne tient pas la route », dit Michel Muller, en saluant « le haut degré de responsabilité » des Rambuvetais, « respectueux de leur outil de travail ». Le secrétaire général de la Filpac leur propose les moyens du Livre pour sortir un « quatre pages » tiré à plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines de milliers d'exemplaires.

Une proposition retenue, d'autant que le petit journal sera vite rempli : les papetiers, qui ont depuis lundi un site internet à eux (1), ont plus de matière qu'il n'en faut. Le « quatre pages » sera notamment distribué le 14 février prochain à Epinal, où une manifestation est prévue, trois jours après le CE du 11 « qui va nous couper la tête », soupire Jean-Christophe Capdet, qui rêve d'aller demander des explications au PDG Henri Kreitmann, celui qui a « tiré un trait » sur l'usine de Ramber.


Créer l'événement
Avant ce rendez-vous dans la cité des images, les salariés en ont un autre, demain matin. A eux qui cherchaient le moyen de « créer l'événement » en évitant le coup de force, le maire de Gérardmer Jean-Paul Lambert a offert hier le décor de Fantastic'arts : une délégation des papetiers est attendue demain à 9 h 30 au coeur du festival, sur la place du Tilleul. Le député Gérard Cherpion devrait être présent, les caméras de télé sans doute aussi. Et le soutien des stars serait le bienvenu pour médiatiser la lutte au-delà de la ligne bleue.

Par contre, c'est sur le terrain vosgien que les Rambuvetais vont se relayer la semaine prochaine, pour aller à la rencontre des salariés des autres papeteries, comme l'a suggéré un délégué de celle d'Anould : « Nous l'avions fait pour Lana (NDLR : l'ex-papeterie de Docelles). On avait même organisé une quête. » Le but est de rassembler le plus grand nombre possible de collègues le 14 février à Epinal, où la manif des MF devrait mettre en vedette ces fameuses briques Tétrapak dont ils sont sûrs qu'un repreneur pourrait faire son miel à Rambervillers. Où quelques visiteurs intéressés sont attendus ces prochains jours.

Catherine MICHELET-FRÉMIOT (1) www. papeteriederamber. com